Quels sont les bons gestes à adopter pour maîtriser le microclimat sous serre, satisfaire les besoins de la plante et ainsi tirer le meilleur profit de ce mode de jardinage ?
La conduite de l’aération permet la maîtrise de la température et de l’hygrométrie intérieure de la serre
L’aération joue un rôle primordial. Sa première fonction est de favoriser les échanges de flux d’air intérieur/extérieur pour maîtriser la température et l’hygrométrie intérieures de la serre. La température maximale de l’air de la serre, en été, ne devrait pas dépasser, sur une longue période, 35°c. Au-delà de cette température, pour la plupart des plantes, les stomates des feuilles se ferment, réduisant fortement la photosynthèse et la transpiration. La croissance et le développement des plantes peuvent être durablement affectés.
Dans les serres, une aération en partie haute au moyen d’ouvrants au faîtage peut être manuelle ou automatisée. Dans ce dernier cas, chaque châssis ouvrant est actionné par un piston fonctionnant sur le principe de dilatation d’un gaz. Des réglages du piston permettent l’ouverture et la fermeture à la température désirée. L’air chaud s’accumulant en hauteur est évacuée, la température s’abaisse de quelques degrés et l’air intérieur de la serre est partiellement renouvelé. L’idéal est de disposer, à la construction d’ouvrants de toiture sur les deux côtés du toit. Il est alors possible de choisir le côté d’ouverture en fonction du sens du vent. De trop forts courants d’air à l’intérieur de la serre peuvent provoquer des blessures aux plantes et favoriser la dispersion de spores de champignons pathogènes, Oïdium et Botrytis notamment.
Des techniques complémentaires de conduite de la culture tel que les bassinages qui consistent à pulvériser sur le feuillage de très faibles quantités d’eau sont également très efficaces. Sous l’effet du rayonnement solaire l’évaporation de l’eau absorbe des calories et contribuent à l’abaissement de la température de l’air intérieur. Ces opérations de bassinages, ne doivent pas être confondues avec l’arrosage. Elles ne doivent pas être pratiquées en pleine chaleur mais plutôt en anticipation de la montée en température.
Pour les chenilles nantaises et les tunnels, une aération latérale basse est préconisée pour réduire l’excès d’hygrométrie et de températures et favoriser le « durcissement » des plantes afin de les rendre moins sensibles aux phénomènes biotiques et abiotiques.
Même en hiver, le confinement total doit être évité. La saturation de l’air avec 100% d’hygrométrie empêche la transpiration de la plante et bloque en partie ses fonctions dont la photosynthèse. En été, l’ambiance chaude et humide est très favorable au développement des champignons et bactéries pathogènes. A contrario, cette même ambiance est très favorable au bouturage. En évitant la transpiration des jeunes boutures elle favorise l’enracinement. Dans ce cas on parle de culture à l’étouffé.
L’aération sous abri doit toujours être très progressive pour éviter les changements brutaux de température et d’hygrométrie défavorables aux fonctions de la plante et susceptibles d’altérer la qualité de ses organes, les fruits en particulier. En hiver, il se peut que des plantes, à l’intérieur, aient subi une légère attaque du gel. Dans ce cas contrintuitivement il ne faut pas laisser la serre fermée pour obtenir une montée rapide de la température, mais, au contraire, aérer fortement dès constatation des symptômes sur les plantes pour obtenir une remontée de température la plus lente possible. L’intégrité des cellules de la plante sera ainsi mieux conservée.
La possibilité de renforcer la thermicité nocturne de la serre en hiver et en saisons intermédiaires (printemps et automne)
Le doublage de la paroi par un film plastique posé à l’intérieur de la serre permet une meilleure protection contre le gel en hiver et de gagner quelques précieux degrés la nuit au printemps. La pénétration de la lumière sera dans ce cas quelque peu réduite, mais l’effet global sur la croissance demeurera très positif. L’efficacité de ce doublage sera améliorée si entre les deux parois de l’air peut circuler. La thermicité peut encore être améliorée par l’utilisation nocturne d’un film plus opaque ; mais dans ce cas le film de doublage devra être retiré le jour. Le film polyéthylène alvéolaire, souvent appelé « film à bulles » répond parfaitement à cet usage. Les jours sombres et froids de l’hiver, pour la protection des plantes contre le gel on pourra le laisser au-dessus des plantes jour et nuit. Au printemps, en phase de croissance des plantes, dans la mesure du possible, on le retirera le jour pour laisser pénétrer un maximum de lumière et de rayons infra-rouges courts apportant la chaleur qui sera piégée la nuit par la remise en place du film sur la culture.
Une pratique astucieuse et peu coûteuse consiste à placer un double tunnel à l’intérieur de la serre. Dans ce cas le film est simplement posé sur des arceaux au-dessus de la culture.
Les serres les mieux équipées peuvent recevoir au sommet de la serre, un écran thermique amovible pour limiter la déperdition de la chaleur par la toiture. Les films aluminisés qui réfléchissent le rayonnement interne de la serre sont les plus efficaces. Certains films peuvent aussi servir d’ombrière en été.
Une technique complémentaire consiste à créer à l’intérieur de la serre des accumulateurs de chaleur. Des bidons opaques noirs remplis d’eau peuvent efficacement jouer ce rôle. L’eau se réchauffe le jour sous l’effet du rayonnement solaire capté par la couleur noire et libère progressivement sa chaleur la nuit. Un empilement de briques rouges en paroi nord qui est une reconstitution simplifiée du modèle de la serre adossée est également très efficace. Nous savons que quelques dixièmes de degré, voire degrés ainsi gagnés peuvent avoir un effet très significatif sur la végétation des plantes.
L’ombrage de la serre en été
Nous avons désormais des ciels d’été de plus en plus lumineux qui, outre une température excessive à l’intérieur de la serre, peuvent provoquer de brûlures directes, par rayonnement, sur le feuillage et surtout sur les fruits (cas fréquent des coups de soleil sur les tomates). Une occultation partielle de la lumière qui arrive sur les plantes est possible, principalement de 2 manières :
- Tendre un filet d’ombrage au-dessus de la culture. Certains modèles de serre intègrent ce dispositif dès la construction, associé ou non à un écran thermique utilisable de nuit pour augmenter la thermicité de l’ensemble.
- Procéder au blanchiment de la paroi par une pulvérisation de lait de chaux sur sa face extérieure. Des produits du commerce peuvent être utilisés ; en vérifiant bien qu’ils soient compatibles avec la nature de la paroi, notamment pour les films plastiques et qu’ils puissent être facilement nettoyés en fin de saison. Mieux vaut avoir à refaire une opération de blanchiment après un orage que de perdre de la pénétration de la lumière aux saisons intermédiaires !
La sectorisation des usages sous l’abri
L’orientation de la serre et la localisation des ouvertures, portes et aérations, entrainent souvent des différences de températures à l’intérieur de l’abri. Il est possible de mettre à profit ces différences pour organiser les activités.
La zone la plus chaude, avec un rayonnement diffus sera réservée aux semis, bouturage et plantes en forçage. La zone à proximité des ouvertures sera plutôt destinée à la culture de plantes tolérantes aux variations de températures. Au centre de la serre on pourra cultiver les plantes les plus délicates, en sol ou sur tablettes, en pots.
La conduite de l’irrigation sous la serre
La présence de la paroi isole la culture des apports d’eau des pluies. Il faut donc entièrement satisfaire les besoins en eau par l’irrigation. Dans cette enceinte semi-confinée, l’évaporation du sol ou du substrat de culture et la transpiration des plantes sont modifiées de manière contradictoire :
- La quantité réduite de lumière arrivant sur les plantes tend à réduire leur besoin en eau.
- L’augmentation de l’hygrométrie ambiante permet de laisser les stomates des feuilles ouverts et donc opérationnels plus longtemps au cours de la journée.
- La réduction de la mobilité de l’air à l’intérieur de la serre, par absence de vent, peut limiter les quantités d’eau transpirées par la plante.
Globalement, par souci de simplification, nous considérons que ces facteurs aux effets contradictoires s’équilibrent et que les valeurs d‘évapotranspiration potentielle (ETP) établies pour les cultures en extérieur sont applicables dans la serre.
L’arrosage est indispensable sans être forcément quotidien. L’Irrigation localisée est particulièrement intéressante sous serres. Par contre l’aspersion permet de durcir le feuillage et de le débarrasser des dépôts de poussières. L’aspersion doit être pratiquée à un moment de la journée permettant un ressuyage rapide des feuilles.
Article rédigé par Michel Javoy & Maryse Friot