Baptiste Pierre, jardinier botaniste et médiateur scientifique au potager extraordinaire de La Motte-Achard (85), nous offre un aperçu des plantes et techniques à privilégier dans cette optique. Pour ce pionnier du jardin écologique, « le jardinage est le résultat d’une histoire, de modes, de modèles, de savoirs et de techniques… Aujourd’hui, l’observation et le choix des plantes sont les piliers d’un jardin vivant et sans pesticide. »
La première question serait de savoir pourquoi et comment nous jardinons ? En réalité, les raisons de jardiner sont variées, car le jardin remplit plusieurs fonctions : nourricière, symbolique ou esthétique…
Une évolution récente
Et le jardin sans traitement ne date pas d’hier… En 1900, on jardinait sans produits ! Les jardiniers ont reproduit dans leur jardin ce qui était fait en agriculture. D’autant que dans les années 1950, un courant hygiéniste, porté entre autres par le Touring Club de France, a poussé au fleurissement des villes et des villages. À la campagne, les tas de fumier ont quitté les cours et on a planté en masse des forsythias, des annuelles, des haies… On est allé progressivement vers un jardin propre, maîtrisé et très fleuri… qui utilisait de nombreux engins à moteurs, des produits…
Dans les années 1990, on a assisté chez certaines personnes à une prise de conscience et on a essayé de retrouver des façons plus saines de cultiver. Depuis, on tente de retrouver des modèles, des techniques, des savoirs, plus sains et en rapport avec nos préoccupations actuelles.
Comment jardiner autrement ?
La règle d’or est l’observation ! Il faut observer tout ce qui vit dans le jardin. L’hôtel à insectes est, par exemple, d’abord un outil pédagogique, qui rend curieux. Il incite à comprendre comment les populations d’insectes peuvent être régulées et préservées. Jardiner autrement passe par l’utilisation des fleurs. Mais il faut encore savoir choisir ses plantes, par exemple éviter d’utiliser ces « monstres » horticoles que sont les fleurs doubles… Il en existe chez de nombreuses annuelles, comme les pétunias, gaillardes, pâquerettes… Dans ces variétés, les étamines sont transformées en pétales et les fleurs n’ont pas de pollen, ce qui n’attire pas les insectes. De même, l’Oenothera speciosa, plante introduite, est un danger de mort pour un insecte, le Moro sphinx, dont la trompe reste coincée à l’intérieur. À l’inverse, d’autres fleurs, comme celles du viburnum ou du buddleia, favorisent les papillons. L’abutilon est apprécié des hyménoptères…
Associer et bien choisir
On peut apprendre à choisir les plantes en fonction des bonnes associations, par exemple planter des Tagetes erecta contre les nématodes des tomates. Pour limiter les arrosages, il faut aussi choisir des plantes mieux adaptées à la sécheresse. Dans la nature, de nombreuses espèces sont naturellement équipées pour lutter contre l’évaporation. La santoline est recouverte d’un feutrage blanc qui réverbère le soleil. Les feuilles vernissées de certaines plantes limitent les pertes d’eau…
Inventer de nouvelles techniques
On connaît mieux l’importance du sol. Il faut éviter l’utilisation du motoculteur, ce « hachoir à vers de terre », et lui préférer l’aérobêche qui respecte les strates. Il faut aussi recouvrir le sol. Les nouvelles techniques sans pesticides apportent de nouvelles contraintes. Et l’abandon des herbicides dans les zones minérales a entraîné de nouveaux besoins d’outils. Ainsi, la « Jeanbinette », une sorte de binette très étroite, mise au point aux espaces verts d’Ancenis, permet-elle de désherber entre les pavés. L’utilisation de vinaigre dilué, de paillage permet également de lutter contre les mauvaises herbes.
Enfin et surtout, le jardinier doit désormais penser local et acheter ses plantes près de chez lui, pour obtenir des conseils et des végétaux personnalisés. Il peut aujourd’hui améliorer ses connaissances grâce à de multiples sources, dont les associations qui restent incontournables.