Dans le sud, la sécheresse, les sols, le vent, s’ils conviennent à de nombreuses plantes, sont très défavorables à d’autres. Face à cette réalité, Josiane Ubaud (ethnobotaniste et présidente de la Société d’Horticulture et d’Histoire naturelle de l’Hérault, conférencière et auteure) tente d’alerter les jardiniers et les aménageurs sur l’importance du choix végétal.
C’est en observant les paysages environnants que Josiane Ubaud a forgé ses convictions.
» Dans leur milieu naturel, les plantes méditerranéennes n’ont besoin ni d’arrosage, ni de traitement ! A-t-on déjà vu du thym, du romarin, des sauges malades dans la garrigue ? «
Pour jardiner autrement, il faut donc favoriser les espèces méditerranéennes dans les jardins et les espaces verts de la région, plutôt que des espèces qui ont besoin d’arrosages abondants et de soins de protection particuliers.
Une large palette
Est-ce pour autant une démarche réductrice ?
» Certes non, explique Josiane Ubaud, car la notion de plante méditerranéenne ne se limite pas aux plantes sauvages de la région. La palette est très variée. Elle comprend aussi de nombreuses plantes venues de régions lointaines comme la Californie, des régions d’Australie ou d’Afrique du Sud qui ont des climats voisins (Escallonia, Grevillea, Feijoa, sauges, Mesembryanthemum, perovskias ou encore miscanthus, stipas, romarins…). «
Non à la « palmérite » !
Pour Josiane Ubaud, l’utilisation massive de certaines espèces reste une aberration.
» Le palmier est utilisé à tort et à travers. En Languedoc-Roussillon, il pousse mal en raison du vent, du froid et parfois des embruns. Les palmes sèchent en partie terminale. Les palmiers finissent souvent par mourir. En plus et contrairement à des espèces traditionnellement plantées sur les places de village comme les tilleuls, micocouliers ou autres platanes, il ne remplit aucune fonction d’ombrage et ne permet pas aux gens de se retrouver… «
De même avec les oliviers. cet arbre sacré et symbolique a depuis quelques années un usage galvaudé et banalisé qui doit être repensé… L’autre exemple est le gazon qui, semé massivement dans certains ronds-points constitue une aberration écologique en raison des quantités d’eau nécessaires à son arrosage. Un grand nombre de mairies ont même préféré le remplacer par du gazon synthétique…
Une démarche innovante
Pour Josiane Ubaud, tout doit partir de l’observation du paysage et de sa dimension culturelle et symbolique.
« L’homme aujourd’hui ne retient que la valeur d’usage. Il consomme du végétal et commet de nombreux contresens. Il faut éduquer son regard aux paysages méditerranéens. »
Défendre les paysages locaux n’implique pas pour autant un refus des plantes nouvelles. Josiane Ubaud aime à rappeler que l’histoire des paysages a été une introduction perpétuelle de plantes venues d’ailleurs. les nouvelles introductions doivent cependant être faites dans un souci d’authenticité, en adaptant la nouvelle plante aux spécificités du lieu.
Non à l’uniformité
La France bénéficie d’une multitude de paysages. Cette multiplicité doit se retrouver au niveau des espaces verts.
« Pourquoi faudrait-il que tous les ronds-points et les jardins de France se ressemblent, de la Bretagne à la Méditerranée, s’étonne Josiane Ubaud. Il y a quelques années, la création de haies toutes identiques a entraîné un appauvrissement considérable des paysages. Il existe cependant de nombreuses plantes qui permettent une floraison en toutes saisons : Diosma, coronilles, Grevillea, romarins offrent des alternatives intéressantes… »
Ainsi, une meilleure connaissance des plantes et des paysages, y compris dans leur aspect botanique, social et symbolique, peut permettre de redonner du sens à nos jardins et d’éviter des contresens culturels et des aberrations techniques.
Interview réalisée par Agnès Guillaumin